Noon montre le coup de canon tiré à Rome, chaque jour, à midi pile, sur la colline du Janicule. Ce rituel a été instauré le premier décembre 1847 par le Pape Pie IX, avec le but de coordonner les horloges des églises de la ville. Interrompu pendant la deuxième guerre mondiale, il est repris pour l’anniversaire de la date de la fondation de Rome, en 1959. La caméra d’Elisabetta Benassi, accompagnée de la musique de Tomio Tremmel, donne à ce coup de canon les allures d’un rituel absurde : un déchaînement de violence sans but, méticuleusement organisé, dans lequel l’aveuglement de l’explosion répond à celui du soleil écrasant les paysages, et se reflétant sur la pièce d’artillerie.

Sous le soleil de midi, plusieurs temporalités se télescopent. Le souvenir de la guerre croise un imaginaire apocalyptique de science-fiction. Le besoin moderne de régler et mesurer le temps semble quant à lui rejoindre le culte du « Sol Invictus », pratiqué par l’armée romaine au troisième siècle, et progressivement assimilé par le christianisme.

Philippe Bettinelli, 2025