Trois travellings successifs reconstruisent l'environnement de l'enfance de Sanja Ivekovic. La caméra filme en plan séquence une cuisine, à la hauteur des yeux correspondant à trois tranches d'âge différent. Filmé en gros plan, chaque détail prend une valeur importante. A l'image du regard d'un enfant, le moindre élément peut être source de contemplation ou d'imaginaire. Le cadrage donne une perspective inattendue sur un environnement domestique quotidien, véritable microcosme intime. Dans la succession de ces images, l'ensemble peut se résumer à du motif, allant des grands carreaux aux rayures en passant par un motif végétal. Le mouvement de caméra développe une série de tableaux abstraits. Après un plan sur une serviette brodée représentant une enfant, le dernier travelling s'achève sur le portrait de Sanja, devenant ainsi le point final de cet ensemble de vues. De la petite fille, dessinée avec une technique traditionnellement réservée aux femmes, jusqu'au portrait adulte dans la cuisine, on voit un portrait de femme à une place traditionnelle. Le gros plan souligne le conditionnement et l'enfermement de la condition féminine. C'est un peu une vision avec des œillères réservée à la petite fille, telle que la critique Sanja Ivekovic dans l'ensemble de son œuvre, même si la vidéo se vit comme une rêverie picturale.

 Patricia Maincent